Minutage et surveillance, la situation est loin d’être optimale | Blogue de Louise Chabot

Échec du système économique monétaire capitaliste oligarchique et du système administratif bureaucratique.

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Minutage et surveillance, la situation est loin d’être optimale

11 juin 2014

Minutage et surveillance, la situation est loin d’être optimaleJe vous parlais dans un billet précédent du principe de la Nouvelle gestion publique (NGP). Cette idéologie de gestion déshumanisante prétend que l’on peut gérer un centre de santé et de services sociaux (CSSS) comme on le ferait pour une chaîne de montage de lave-vaisselle. Cette méthode fait des ravages chez le personnel de la santé et des services sociaux et ça peut être dangereux pour les usagères et usagers.

Le personnel à bout de souffle

Les syndicats membres de la Fédération de la santé du Québec (FSQ-CSQ) ont dénoncé la situation au cours des dernières semaines : le personnel est à bout de souffle. Les multiples compressions budgétaires infligées au réseau au cours des dernières années imposent au personnel de faire toujours plus avec moins. Que ce soit le personnel infirmier, le personnel infirmier auxiliaire, les personnes préposées aux bénéficiaires, le personnel d’entretien, tous sont surveillés, minutés, poussés à bout !

Des firmes de consultants débarquent dans les établissements et minutent leurs faits et gestes pour « éliminer les temps morts ». Il faut entendre ici le temps non consacré à des activités rémunératrices pour l’établissement dans la logique du financement à l’acte. Ce minutage ne tient pas compte du temps passé à offrir un service humain, à tous ces moments qui insufflent un sens au travail quotidien du personnel soignant et assurent la qualité de la relation thérapeutique.

On perd du temps

Ce faisant, on perd littéralement du temps dans la gestion du travail. Prenons le cas d’une travailleuse sociale qui rencontre des usagers pour faire un suivi de leur situation. Son gestionnaire lui demande d’en voir quatre par jour, à raison d’une heure de rencontre par usager. Ce qui laisse, en théorie, trois heures à notre travailleuse pour effectuer les appels téléphoniques requis dans ses dossiers, entrer ses notes et compiler les statistiques.

Je dis en théorie parce que dans les faits, vous vous doutez bien que la réalité est plus complexe. Imaginons un instant qu’il y a une panne de métro ou du trafic1 et toute cette planification tombe à l’eau ! Il est possible aussi que la consultation précédente prenne un peu plus de temps que prévu, on a affaire à des humains après tout. Que faire dans ce cas ? Renvoyer notre usager au bout d’une heure malgré son besoin d’aide ? Plus de temps non plus pour accompagner les personnes dans leurs démarches auprès d’organismes gouvernementaux, communautaires ou autres, de les aider dans leurs démarches, de faire des suivis, etc.

Le comble du comble, c’est qu’on ne considère même pas le temps requis pour adhérer aux nouvelles exigences administratives dans ce nouveau calcul du temps de travail !

Surveiller et diviser pour régner

Si je vous disais que dans certains établissements du réseau de la santé et des services sociaux, les caméras de surveillance ne sont pas là pour la sécurité des patients, mais bien pour mieux compiler et analyser le travail du personnel soignant, cela vous étonnerait-il ?

Caméras, firmes de consultants en optimisation, augmentation du nombre de cadres, recours à la délation, logiciels de calcul, autant de méthodes qui viennent déshumaniser les milieux de travail et créer un climat de pression constante, voire d’oppression. Ce n’est pas pour rien que les taux d’absentéisme au travail ont augmenté radicalement dans les dernières années. La pression psychologique, les heures supplémentaires obligatoires et l’intensification d’un travail de plus en plus répétitif et vidé de sens pèsent lourd sur les épaules du personnel soignant.

Dans un tel contexte, le personnel peut se sentir impuissant et hésite à dénoncer les mauvaises conditions liées aux transformations de leur milieu de travail. Cette loi du silence doit cesser. Les organisations syndicales devront rapidement emboîter le pas à la FSQ-CSQ pour condamner ces situations et proposer des solutions de rechange. N’oublions pas que le système a d’abord et avant tout été mis en place pour répondre aux besoins d’êtres humains. Pour qu’il fonctionne de façon optimale, on doit écouter celles et ceux qui y travaillent et le ramener à échelle humaine.

1 Il est plus difficile d’imaginer le contraire me direz-vous !

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